LE CHEVALIER BIGAME ou L'HISTOIRE DE MARIE D'OSTREVANT et du chevalier GILLION

LA FAMILLE D'OSTREVANT

 

C'est au début du XIIème siècle, à l'époque des fils d'Anselme de Bouchain, qu'il faut placer le début des extraordinaires aventures de la princesse marie d'Ostrevant et de son époux Gillion le Courageux.

 

La famille d'Ostrevant, représentée alors par Godefroi de Bouchain et son frère Hugues, châtelain de Valenciennes, s'était montré hostile au Comte Robert de Flandre.Les cambrésiens révoltés contre leur évêque Gaucher, avaient pris comme défenseur Godefroi de Bouchain.

Précedemment, avant que le pays fut pillé par l'Empereur Henri IV et que Bouchain eut ses murailles abattues, les chevaliers d'Ostrevant étaient restés fidèles à la cause de la Flandre dont Baudouin III, Comte de Hainaut, était l'ennemi.

 

En 1120, Baudouin meurt, et sa femme Yolande élève leur fils Baudouin IV avec beaucoup de dignité.

Sa mère lui fait épouser Alix de Namur et, ensuite, elle se remarie.

Son nouvel époux est godefroi III, Comte d'Ostrevant qui avait une soeur, Marie d'Ostrevant, élevée à la cour se son parent, Baudouin II de Hainaut.

 

MARIE ET GILLION

 

Au château de Bouchain, la douce princesse Marie d'Ostrevant, que d'autres dénomment Béatrix, rencontrait souvent Gillion le Courageux, beau chevalier, sire de Trazegnies.

Leurs désirs d'union étaient visibles, et l'honnêteté et la bravoure du chevalier étant appréciées par Godefroi et Yolande qui n'opposèrent aucune résistance aux jeunes fiancés.

Le mariage fut célébré à Avesnes.

 

Marie et Gillion n'avaient pas d'enfant et, au bout de quelques années, ils éprouvèrent un grand chagrin. Gillion, sans le dire à sa femme, fit le voeu de partir à Jérusalem, s'il lui était donné d'avoir un héritier.

Les adieux de Marie à son époux furent désespérés,et terribles.

Lorsque Gillion arriva sur la côte, son escorte est attaquée par les turcomans.

Gillion fut conduit devant le sultan d'Egypte qui ordonna de mettre à mort tous les chevaliers hainuyer.

Gillion marcha au supplice avec tant de courage qu'une des filles du Sultan, la tendre et belle Gratiane de Babylone, demanda à son père et obtint la vie du chevalier.

Gillion se fit remarquer non seulement par Gratiane mais aussi par le Sultan qui lui confia le commandement d'une armée.

Gratiane apprit le français en compagnie de son esclave Gillion qui  dut faire voeu de ne plus jamais reprendre le chemin de son pays.

Elle connaissait l'histoire de Marie d'Ostrevant.

Gratiane savait qu'il y avait là-bas, dans ce lointain pays inconnu d'elle, une malheureuse épouse qui attendait sans cesse le retour du chevalier.

Et Gratiane pleurait souvent et souffrait visiblement beaucoup.

 

AMAURY DES MAIRES

 

Mais un jour, coup de théâtre : un chevalier se présenta à la cour du Sultan ; il avait eu beaucoup de difficultés à venir en ce lointain pays, lui natif du hainaut ; il s'appellait Amaury des Maires

Le Sultan consentit à le laisser parler à Gillion ; et là, le malheureux captif apprit de la bouche de son ancien compagnon d'armes que Marie d'Ostrevant, sur le point d'être mère, était morte peu de temps après le départ de son mari pour Jérusalem. La maman et l'enfant avaient été mis ensemble en terre.....

Aux regards de Gratiane, il avait compris qu'elle l'aimait et que Marie morte, il était maintenant libre.

 

Mais le Sultan fut attaqué à nouveau par ses ennemis, et Gillion dût reprendre les armes.

Les combats eurent une issue fatale pour Amaury qui fut tué sans avoir pu se confesser à son ami.

Gillion fut fait prisonnier une seconde fois.

Une nuit, il s'échappa et Hertan, le serviteur noir de Gratiane  le conduisit vers un navire. Gillion, comprit que Gratiane avait  combiné cette fuite et Gillion, sans remords possibles, devint l'époux de Gratiane.

 

 

LES FILS DE GILLION

 

Les années passèrent.

Un jour, venant d'Europe, 2 jeunes chevaliers intrépides et résolus se présentèrent au sultan. Ils se déclaraient fils de Gillion de Trazegnies qu'ils recherchaient partout, sur ordre de leur mère.

Ils étaient nés quelques mois après la disparition de leur père, 20 ans plus tôt.

Gillion comprit alors le mensonge du perfide Amaury, qui prit de remords, avait expié sa forfaiture par une mort volontaire, lors ce combat où il savait s'exposer au danger.

Il fallait que Gillion reparte pour son pays où Marie l'attendait, ne se doutant de rien.

Mais les 2 jeunes chevaliers, instruits de ce qu'il s'était passé durant la longue absence de leur père, voulaient que Gratiane parte avec eux. Elle semblait   brûler de désir de voir le pays natal de son époux.

Mais la situation tragique dans laquelle elle était placée, par la survivance de Marie d'Ostrevant,  la minait et ruina sa santé. Elle tomba gravement  malade, il fallut la ménager.

En Italie, elle se fit baptiser.

 

 

LE RETOUR

 

Ils arrivèrent finalement à ce château de Bouchain où, autrefois, Marie et Gillion s'étaient déclarés leur amour, sur les berges verdoyantes de l'Escaut.

Marie se trouvait alors dans la seigneurie de Trazegnies. On alla l'avertir et, quelques jours plus tard on la vit apparaître en grand désarroi. Baudouin IV vint également à Bouchain pour fêter le retour de Gillion et de ses deux fils, JEAN ET GERARD.

La bonne Marie d'Ostrevant savait que Gillion avait  été sauvé de la mort  par Gratiane. Elle fut prise de sympathie pour cette étrangère si douce, si compatissante.

Dès lors, la situation eut été intenable sans la bonté d'âme des deux malheureuses héroïnes.

Elles décidèrent toutes deux d'entrer dans le même monastère.

Mais le mal dévorait de plus en plus Gratiane et Marie resta à son chevet.

 

GRATIANE ET MARIE

 

Gratiane mourrut, et  quelques jours   plus tard ce fut Marie qui expira à son tour.

Selon leur volonté, elles furent enterrées dans le même tombeau.

Gillion avait déjà revêtu auparavant l'habit de moine. Mais miné par le chagrin, il sortit de son établissement religieux et voulut à nouveau combattre en Orient où il fut tué.

 

Des narrateurs disent avoir vu le tombeau réunissant les deux épouses éplorées. Deux belles statuts les représentaient.

On découvrit aussi, entre les deux corps, un coffret renfermant le coeur de Gillion de Trazignies, que son fils Gérard était allé rechercher en Orient.

 

On parla de cette histoire, sous le chaume, bien longtemps....

 

 sources : - texte de Maurice Bétrancourt, Sandrine H. Dussart, d'après ... :

                     - Archives historiques et littéraires du Nord de la France, et du Midi de Belgique

                     - M.  Leigniel